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Avis: Inventaire � la Pr�vert

@Questions de femmes : Je n'ai pas de conseils à vous donner, Madame, et je ne suis pas moraliste. Donc vous faites ce que vous voulez, mais je serais vous, je convoquerais le monsieur en session extraordinaire pour une explication entre quat'z'yeux et je lui intimerais un ultimatum : il y a un contrat passé entre vous et lui, il n'honore pas sa part du contrat, il a désormais un choix à faire entre vous et Je contacte, sans compromis possible.
Il doit comprendre, ce gars-là, qu'il y a quand même une distinction entre être cool et être conne. Or, il vous croit cool mais il vous prend pour une conne. Si c'est un jeu pour lui c'est une souffrance pour vous. Il vous manque de respect et une fois encore, je serais vous, le mec n'aurait plus qu'à faire ses bagages.
Pour répondre à votre question, je n'ai passé que quelques heures sur Je contacte. J'ai vite fermé mon profil. Personne ne me correspondait dans le coin où je vis, et je n'avais pas envie que tout un chacun sache que j'étais inscrit sur ce truc sur la base d'une recherche Google.
Par contre, je passe du temps, quand je n'ai que ça à faire, à dépiauter ce casting ahurissant. Je le fais parce que depuis que j'ai l'âge de penser par moi-même, je m'intéresse à la nature humaine, à ses tenants, ses aboutissants et ses bizarreries.
J'ai fréquenté et fréquente d'autres sites et tchats gratuits dédiés à la rencontre tous azimuts, y compris certains d'un genre qu'on qualifiera de olé-olé. Le constat est aussi édifiant. Des solitudes, des marginalités, des détraqué(e)s en quête d'impossible, des attentes qui divergent entre hommes et femmes, des rencontres qui dans l'ensemble ne se produisent pas, le curieux sentiment que la rencontre effective n'est pas le véritable objet de la démarche : c'est l'imaginaire qui prime, on est là pour fantasmer en tuant le temps. C'est la conclusion provisoire que j'en tire.
Vieux garçon authentique, je suis un vétéran de la rencontre qu'on qualifie aujourd'hui de "libertine" (le terme, inapproprié, renvoie à un courant en vigueur au XVIIIème siècle qui n'avait pas à voir qu'avec la gaudriole). Comme indiqué par ailleurs, j'ai connu le supplément "Sandwich" de Libé, le Réseau, les téléphones roses de Berlusconi et Xavier Niel dans les années 90, la vogue de la CB (citizen-band, je précise). On savait pourquoi on y allait et ça se passait dans les faits, les rencontres se faisaient, le sexe n'était pas alors mythifié comme il l'est devenu aujourd'hui, et que je sache, personne n'en est mort pour autant que certaines précautions aient été prises.
Les sites de rencontres où on ne se rencontre pas, comme Je contacte, posent différentes questions relatives aux mentalités d'une époque et aux conséquences de l'utilisation d'internet sur les comportements, comme j'ai voulu l'exposer plus haut. On reste dans le flou, on ne sait pas très bien ce qu'on veut, c'est l'imaginaire avant tout, on joue à vouloir rencontrer quelqu'un sans s'en donner les moyens et on s'enfonce dans des situations de solitude qui vont s'aggravant avec les années. A cela s'ajoute la question des distances géographiques. On va éventuellement trouver quelqu'un qui nous correspond mais la dame, le monsieur vit à Pétaouchnok et si on recourt aux services d'un site gratuit, c'est qu'on n'a pas forcément les moyens de se déplacer vite et loin et la relation est tuée dans l'oeuf en tant qu'elle n'a guère de chances de devenir effective. Mais comme on s'emmerde dans sa vie, qu'on est seul(e), on va la faire perdurer sous la forme d'une correspondance qui certes va tuer quelques minutes chaque jour mais qui ne va pas faire avancer le schmilblick.
Ensuite vous vous heurtez à un autre problème quand vous vivez dans une région paumée comme il en existe tant dans ce pays : vous allez tomber quel que soit le site sur les mêmes profils dont certains sont inscrits depuis des années, de femmes, d'hommes qui ne sont jamais sortis de leur terroir. Et vous allez passer des mois, des années à faire du sur-place.
C'est l'un des paradoxes de ces sites soi-disant de rencontres, dont certains, à force, finissent par être désertés.
Derrière se profile les multiples questions, encore des questions, qui se posent autour de la solitude. Pourquoi on est seul(e), pourquoi ça dure, qu'est-ce qui fait qu'on n'en sort pas alors qu'hors de l'internet, dans le monde réel, il existe toujours des terrasses de café, des baloches, des assos', des boîtes de nuit, des clubs de sports, des plages, des ateliers d'écriture, des thés dansants lorsqu'on est en âge de les fréquenter, toutes sortes d'occasions de partager ses goûts et les trucs qui nous passionnent et qui composent autant d'"objets transitionnels", comme les qualifient les psychologues, susceptibles de créer du contact effectif. Ne serait-ce qu'en allant promener son toutou.

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@Questions de femme : Des sites du genre Je contacte il y en a quatre ou cinq, pas plus, diversement fréquentés (certains sont de véritables cimetières). Les autres sont payants. Ce qui laisse des traces sur le relevé de compte.
Le problème que pose la situation que vous décrivez se tient dans l'intentionnalité. Encore une fois, je ne juge personne et ne verse pas dans le moralisme. J'essaie d'appréhender les faits avec la distance nécessaire et surtout, mon expérience de mec.
Que va t-il chercher, votre homme, dans ces bas-quartiers du web, que vous ne sachiez lui apporter
?
Tout est là. Dans l'intentionnalité. Il a fait un jour la démarche de créer un profil et il y a collé des photos de lui. Il aurait pu s'en tenir à des discussions sur un tchat générique comme il en existe encore, à des échanges sur un groupe de Facebook, mais il va sur Je contacte. Par curiosité, avance t-il. Où il entretient "de rares échanges".
Il sait que vous savez et que vous en souffrez. Et comme Cactus, j'ai l'impression que vous cherchez à vous rassurer. D'un autre côté vous avez tout juste en pensant que de toute façon, cette intention de toucher du doigt une autre réalité, elle est bien là et pourrait se traduire par la fréquentation d'autres sites aussi malfamés.

Statu quo, donc. Qui ne présage rien de bon pour votre couple, je préfère y aller franco pour avoir vécu semblable situation. A savoir que j'étais en couple depuis pas mal d'années (oui, ça m'est tout de même arrivé), que ledit couple s'effilochait entre routine et adversité, bref, chacun s'ennuyait dans son coin. Et j'ai commencé à entretenir une correspondance avec une nana que j'ai fini par rencontrer. Le reste, pas besoin de vous faire un dessin.

On est ainsi faits, nous les mecs. Ce n'est pas une fatalité, c'est une nature. Le couple est une construction sociale qui tient par des conditionnements moraux. L'amour est une vue de l'esprit. Un emportement au départ où entrent en jeu des projections et des rêveries qui s'étiolent au fur et à mesure que les années passent, pour laisser place à un attachement né de l'habitude et d'un besoin de sécurité qui nous est fondamental, à nous humains.

L'homme le plus droit qui soit, flanqué de la femme la plus belle, la plus aimante, la plus tout ce qu'un homme rêve et attend d'une femme, tournera toujours son regard et ses fantasmes vers la paire de jambes, la paire de fesses qui passe, sitôt que sa femme n'est pas dans le coin. Quand il demande à sa femme de porter ceci plutôt que cela, c'est en général qu'il l'a vu porter par une autre sur qui il a fantasmé. Et vous ne savez pas ce qui se joue dans sa petite tête au moment de l'étreinte.

Les femmes ne sont pas dans cette logique. Leur force se tient dans l'ignorance où nous sommes, nous les mâles, de ce qui chez nous va déclencher leur désir.

L'obsession consumériste du siècle, les modèles fictifs qui nous sont balancés, le porno à portée de souris qui tend à faire croire à certains que le sexe c'est ceci plutôt que cela. Alors que dans les faits vous finissez rapidement par faire le tour de la question. Eh oui ! Le kamasoutra c'est de la fiction ! On est faits comme on est faits et il n'y a pas quarante-douze possibilités. D'où la nécessité chez certains couples - où la nana n'est pas forcément partie prenante, m'enfin le mec ne lui laisse pas trop le choix, donc elle suit vaille que vaille... - d'épicer le menu au moyen de frou-frous, de gadgets, de sorties en boîtes spécialisées, d'adhésion à des "techniques" aux appellations ésotérico-exotiques qui se pratiquent à plusieurs. Ce qui suppose d'être jeune, désirable et d'entrer dans certains cadres adoubés par le Big Brother consumériste.

Derrière tout ça, il y a ce vide existentiel que vous pointez, Questions de Femme.
Il a toujours été là, ce vide. Les philosophes de l'Antiquité l'évoquaient. Ceux qui ont suivi aussi, de Schopenhauer à Cioran en passant par Nietzsche. Sauf qu'avant, on n'en avait pas conscience ou si peu. On avait pas les éléments de comparaison dont on dispose aujourd'hui. Eléments de comparaison qui valent pour autant d'illusions. Des modèles, des contre-modèles déclinés ad nauseam sur le Net, dans les feuilletons, les docus, les reportages où on vous montre des individus à la vie bien remplie, qui voyagent, qui vivent leurs passions, qui choisissent leur vie de A à Z. Ce qui concerne en gros 10 à 20% de la population de cette planète. Pour les autres c'est le charbon, les petits chefs, les factures, les crédits, les emmerdes au quotidien, la guéguerre en continu avec l'Administration, le loto et ses rêves d'évasion, le temps qui passe et qui laisse désillusions et rides, la perspective affreuse de la vieillesse, laquelle a longtemps été vécue comme un phénomène naturel et qui désormais est à ce point diabolisée, présentée comme le contre-modèle absolu, qu'elle sera vécue par beaucoup comme un châtiment.
Le Net ne s'est pas pointé un beau jour du milieu des années 90 avec la promesse de nous délivrer de tourments vieux comme l'Humanité. Le Net au départ était un instrument de communication libertaire après avoir servi de vecteur de transmission interarmées aux USA, puis de vecteur d'échange entre universités, toujours aux Etats-Unis. Quand le Net s'est étendu à toute la planète, quand il n'était encore qu'un truc compliqué réservé aux initiés, l'idée-racine était la liberté d'expression, laisser à chacun le droit de s'exprimer, s'exposer, s'informer, se cultiver, échanger des données. Quand le truc s'est démocratisé, la loi du marché s'est imposée et ratissant large, elle en a fait ce que nous en connaissons. Comme la télé est devenue une poubelle au détour des années 80. Comme les radios libres de ces mêmes années 80 ont fini par rentrer dans le rang, à savoir devenir des machines à fric où pour les beaux yeux des annonceurs, il est plus intéressants de diffuser en boucle les sous-produits de The Voice que du rock alternatif autoproduit par un groupe auvergnat, ou des débats spontanés sur la critique de la mondialisation et ses méfaits sur l'environnement.
Sachant que le monde actuel, où tous les idéaux solidaires ont été passés à la moulinette, est régi par deux et deux seules motivations : le fric et le cul, le Net et son dérivé le web ont suivi le courant. On ne crée pas un profil sur quelque site de rencontres que ce soit pour échanger sur la fabrication-maison du pâté d'alouettes. L'utilisation d'un ordi et les modifications des comportements qu'à la longue et insidieusement elle induit chez tout un chacun, procréent de la solitude et de l'isolement là où nous aurions besoin d'aller les uns vers les autres sur le terrain du réel. Echanger "pour de vrai" pour ne pas devenir autistes et avec les années, complètement gagas.

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Pour rebondir sur ce qui a été dit, j'approfondirai sur une expérience que j'ai brièvement relatée par ailleurs, qui en son genre est la version opposée de ce que Questions de Femme est en train de vivre.
J'ai entamé il y a deux ans de ça une correspondance avec une nana, sur un site analogue à Je contacte, en moins déjanté (Le béguin pour le citer). Elle aime bien mes façons sans détours, le côté brut de décoffrage (là je la cite), elle est mal mariée, on est relativement éloignés, on a des goûts et des couleurs en commun. On échange nos mails et s'ensuit une longue correspondance au cours de laquelle elle me raconte sa vie, son couple, son jules, ceci pendant ses heures de boulot dans une administration. J'ai droit à tout. Le mec qui ne fout rien, pas de taf, il picole, il passe ses journées sur le web ou à jouer à des jeux vidéo, le reste du temps il le passe au troquet, au pieu c'est une tanche, il est con, chiant, vieux-jeu, raciste, réac, bref, le beauf à la Cabu.
Elle se tape les courses, les commissions, le repassage et le reste en plus de son boulot. Elle m'envoie des photos, elle est encore jeune et séduisante, coquette, jolie. Elle a eu un temps un amant. Quand je lui demande pourquoi elle reste avec son jules dont elle va répétant qu'il est le con du siècle, elle me répond qu'elle culpabiliserait à mort vu qu'il ne sait pas se débrouiller tout seul. Heureusement il y a les week-ends et les vacances où là, il est "normal".
Il s'est fait qu'un jour j'ai eu à descendre vers chez elle et je lui ai proposé de déjeuner ensemble. Ce qu'elle a refusé. Le cycle des confidences a continué ensuite jusqu'à ce que je décide d'y mettre un terme, au motif que d'une, je ne suis pas psy, deux, je ne suis pas un déversoir à états d'âme, trois, je n'ai rien à foutre de faire partie de l'imaginaire de cette dame, la littérature et le cinoche ont été inventés pour apporter de l'évasion.
Voilà où je veux en venir quand je parle de modifications des comportements induits par un usage immodéré du web.
A une autre époque, cette dame qui avait besoin de se confier à un tiers serait allée trouver un psy, dont c'est le métier de tout entendre, y compris ce qui tient de l'intimité. Là elle va raconter sa vie, l'échec de son couple à un inconnu, un type dont elle ne sait rien... et qu'elle ne souhaite pas rencontrer autour d'une table discrète d'une grande ville, ce que font les grandes personnes quand elles s'écrivent depuis un bon moment.
Pourquoi ? Parce que je faisais partie de l'imaginaire de cette dame et qu'elle ne voulait pas confronter cet imaginaire au réel. A la réalité du bonhomme. Elle s'était fait un film. Quand j'ai compris ça, j'ai sonné le clap de fin.
La différence avec un mec qui va embarquer une nana dans ce genre de scénar, c'est que son but n'a rien à voir avec du cinoche. Il y a une arrière-pensée, même s'il ne se l'avoue pas au départ. Un mec qui va vers une nana est toujours guidé par la tête chercheuse de son missile. Il va passer à l'acte ou non, selon comment ça se passe dans son couple, même si sa compagne est charmante, adorable, attentionnée, désirable, etc. S'il a fait le tour de sa vie de couple et si ses fantasmes le portent vers d'autres horizons, il passera à l'acte.

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@Questions de Femme : Le seul accès au monde tel qu'il est c'est votre porte palière. Au-delà s'étend la rue. Même votre fenêtre peut vous donner une image biaisée du monde. Le Net c'est de l'image subjective, de la photo retaillée, retravaillée, de l'info sourcée à la va-comme-je-te-pousse. De la propagande. Le Net c'est un média qui vous donne du monde et de ce qui s'y passe un aperçu fragmentaire et changeant et contrôlé. Mais comme ça se passe chez soi, face à un écran qui donne l'impression d'obéir au doigt et à l'oeil, qu'on peut se poser devant cet écran en tenue de ville, en pyjama, en bleu de mécano, tout(e) nu(e) ou déguisé(e) en ce qu'on veut sous le sceau d'un prétendu anonymat, on se croit libre de dire, écrire et faire ce qu'on veut, on se lâche, on fait devant cet écran, avec les gens qui se tiennent de l'autre côté, ce qu'on n'oserait jamais faire dans la vraie vie. Le surmoi est éjecté, pas de patrouille pour veiller à la tranquillité du citoyen. Du moins pas visible. Et avec un peu d'expérience, on sait ce qu'il en est de la fiabilité d'une adresse IP.
Si je vous aborde dans la rue pour amorcer le genre de conversation que nous sommes en train d'avoir, vous vous sentirez importunée, vous m'enverrez paître. Si vous êtes jolie voire très jolie, vous vous baladez en ville accrochée à votre smartphone en mode avion, pas qu'il se mette à sonner, histoire d'avoir l'illusion de vous éviter les assauts des gugusses qui vont vous cerner pour vous demander votre 06.
C'est la différence entre la réalité et le Net. La réalité c'est ce qui est. Le net c'est ce qu'on veut (nous faire) croire qui est.
L'identité sexuelle en tant que construction, là je vous suis à la trace et j'étais déjà dans cette réflexion quand ceux qui l'ont mise en avant comme une découverte de l'eau chaude étaient dans les limbes - vous comprendrez pourquoi plus loin. C'est clair qu'un mec ne saurait se définir (que) par ce qu'il a entre les jambes, et une femme (que) par sa capacité à donner la vie (avec la quête de sécurité que cela impliquerait), il est évident aussi qu'il y a une part féminine chez les messieurs, masculine chez les dames - chose dont pas 10% des gens qui nous entourent n'a la plus petite conscience, d'où les amalgames dont peuvent souffrir celles et ceux qui expriment cette part non pas opposée mais complémentaire de leur être - ladite expression pouvant prendre des formes autres que caricaturales et qui échapperont aux définitions qui là encore, entendraient codifier les comportements (genre, le mec qui laisse s'exprimer sa part féminine est à l'écoute, il est empathique, enveloppant... la nana qui laisse parler sa part masculine fait de la moto, sait manier une tronçonneuse, se montre dirigiste...). Si on part de ces idées reçues, produits de cette psychologie de solderie qui nous est balancée à longueur de sites web et qui a débordé de l'écran pour envahir la rue, je préfère vous dire que le mec empathique et enveloppant a toutes les chances de passer sa vie dans une solitude monacale, et notre motarde bûcheronne autoritaire à collectionner les râteaux.
Pour préciser, si je devais me situer par rapport aux échelles complaisamment distillées sur les sites qui traitent d'identité de genre, je pourrais m'affubler de l'étiquette non-binaire. L'ennui, c'est que les gens qui vous parlent de non-binarité sur le web affichent des looks qui dans les rues branchées de San Francisco ou de Londres ou de Berlin passeraient à l'aise, mais qui attireraient sur eux les lazzi des loubards et l'attention des flics dans n'importe quel bled de notre vieille France éloigné de certains quartiers de sa capitale. Et c'est là, Questions de Femme, qu'on en revient aux faux-semblants du Net Ma non-binarité est un continuum et non un look. Comme l'anar que je suis n'a pas besoin de s'habiller en noir et de se promener un couteau entre les dents en citant à longueur de temps du Proudhon et du Ferré. Et ma non-binarité ne fait pas de moi un bisexuel et n'intervient pas sur mon système hormonal. Seulement, allez expliquer ça à la première venue. Les questions d'identité de genre, si elles ont le mérite d'être enfin posées, sont à ce point dévoyées et par les politiciens et par les médias et sur le Net et par les cercles LGBTQI qui en ont fait leur chasse gardée, que le quidam qui n'a pas le temps d'approfondir, qui a autre chose à faire, s'en tient aux caricatures qu'on lui en brandit.
Ainsi, quand je parle à une nana de ma vision du couple en tant que communauté où chacun assume sa part de tâches "dégenrées" (à savoir qu'à moi, le détenteur du zizi, cela ne pose aucun problème de faire les commissions, la cuisine, de tenir un balai, un fer à repasser, ni de coudre un ourlet), et bien ça ne passe pas, mais alors pas du tout, d'autant moins quand la nana appartient à la même génération que la mienne.
Pour ce qui est de la nature "conquérante" des mâles, moi j'y crois pour l'observer chaque jour, et l'avoir toujours observé. Et il est vrai que certaines femmes - certaines seulement - se montrent entreprenantes - ce qui n'est pas une nouveauté, c'était déjà le cas à des époques moins coincées que la nôtre. Continuum, encore et toujours. C'est un travers de l'époque que de découvrir l'eau chaude chaque matin. Ce qui complique tout c'est le bombardement d'informations qui nous est infligé avec son lot d'idées reçues et de conditionnements. Sur le sexe particulièrement. Si vous avez vécu les années 70/80, où le porno se cantonnait aux cinémas glauques où venaient se terrer de malheureux travailleurs immigrés, vous savez qu'on n'avait pas besoin de connaître les subtilités du "creampie", du "bukkake" et autres joyeusetés pour prendre son pied. Et pas besoin de Je contacte pour rencontrer quelqu'un pour un temps ou pour partager des moments agréables. Le sexe tombait sous le sens. Il n'était pas mythifié, intellectualisé, moralisé, diabolisé comme aujourd'hui. La rencontre et la relation font l'objet des mêmes atermoiements. La psy a deux balles citée plus haut non seulement pollue tout sur son passage, mais va empêcher quiconque s'y adonne de se laisser aller vers l'autre. Les grandes théories néo-féministes où l'homme est systématiquement décrit comme un prédateur qu'il convient de castrer, sont là pour achever le sale boulot. C'est le triomphe de la masturbation. Intellectuelle puis comme un pis-aller.
Dans les années 70, dans un film intitulé "Network", on conseillait aux gens de virer leur télé pour redevenir libres et recommencer à penser par eux-mêmes. Un remake de "Network" pourrait nous déconseiller de nous débarrasser du Net et de la télé et des médias pour reprendre possession de nos vies. Car si le Net nous permet d'entretenir ce débat que je trouve fort passionnant, à côté de ça, quel désastre au plan humain en est la conséquence de son invasion dans la vie de tous les jours !
Pour en terminer (momentanément) sur l'objet de votre intervention, et abonder sans le sens de Cactus, oui la communication c'est ce qu'il y a de mieux à condition qu'en face, l'autre y soit disposé. Demandez-lui pourquoi, à votre homme, il a besoin de se trouver des nanas à qui parler sur Je contacte. Allez y franco. Cela vous pose problème, dites-le. Qu'est-ce qui se passe dans sa tête ? A t-il envie d'aller voir ailleurs et si oui, où en est-il de votre histoire à tous les deux ? Ce peut être une crise passagère comme ce peut être un signal d'alarme avant le crash. Vous ne maîtrisez pas la situation, Questions de femme. Reprenez les commandes.

Avis: Inventaire � la Pr�vert

@Questions de Femme : Content de savoir que pour vous la situation a l'air de s'être clarifiée.

Vous avez mieux résumé que moi ce qu'il en est du sexe à l'heure qu'il est : on lui a dérobé son mystère. Le porno a tué l'érotisme et sans jeu de mots de mauvais goût, ça part dans tous les sens.

Quand j'écris mythifié, j'entends codifié. Il n'est qu'à voir les réactions qu'on a ici par rapport à la dégaine des candidats au Septième ciel qui sur Je contacte attendent le miracle. Je parle des types. Les femmes espèrent autre chose autour de ça. Et c'est tellement en décalage par rapport à ce que l'idéologie dominante entend imprimer dans les esprits, que nos réactions mêmes en disent long sur le succès de cette manipulation de masse. Exit les vieilles, les vieux, les moches, les gros(ses), les tordu(e)s, les banal(e)s, les déjanté(e)s, les déconnecté(e)s, les désaffilié(e)s, les pauvres, en somme celles et ceux qui par ailleurs sont des naufragé(e)s d'un système qui privilégie la beauté, la jeunesse, la perfection des corps, la performance et la capacité à faire chauffer sa carte bleue. Je contacte décrit une réalité sociologique qui aurait inspiré Bourdieu. Je contacte c'est la rue dans sa crudité. Le type couramment constitué qui feuillette les profils de femmes se dira de la plupart : je ne pourrais pas me sortir une de ces nanas sans prendre la honte du siècle. Je ne voudrais pas être vu avec une de ces nanas. Elles ne m'inspirent pas de désir. Même si le type en question est à des années-lumière de se coltiner le physique de Jason Statham. Il rêve d'une partenaire aux formes ergonomiques pareille à ces femmes qu'il voit défiler à la télé. Certains qui ont plus de vécu et de plomb dans la tête, sont en quête d'une copine sympa pour partager leur quotidien et se sentir moins seuls. Du moment qu'elle n'est ni vieille ni moche ni obèse, qu'elle a tout oublié de ses ex, qu'elle ne se trimballe pas un physique de concierge de vaudeville, une belle-doche envahissante, trop de marmaille en âge de lui monter la tête quant aux normes en vigueur auxquelles ne correspondrait pas forcément le postulant du jour.
On est dans une optique de désir, pas d'amour. Pas qu'on brûle les étapes, on prend la question à l'envers. On veut baiser d'abord, voir par la suite s'il y a des atomes crochus, si on s'entend. Ensuite on jouera à être amoureux. Combien de couples de façonnent de cette manière aujourd'hui. Selon la qualité de la crampe. La disponibilité de la nana à certaines caresses, sa science de la chose. Sa soumission aux diktats du porno. Rien n'est plus incommode à porter et anti-hygiénique qu'un string. C'est valable sur Je contacte et dans la vie de tous les jours.

Moralisé, diabolisé : c'est le système de défense déployé par les nouvelles féministes qui, exploitant la découverte inédite des abus de pouvoir exercés sur de jolies femmes par certains producteurs de cinéma, cinéastes, acteurs, politiciens, personnalités masculines en vue, iraient jusqu'à prétendre interdire aux gars de proposer un verre à une jolie fille à la terrasse d'un café. Si on les écoute, on ferme les boîtes de nuit comme jadis les lupanars, on colle un flic derrière chaque individu de sexe mâle, et quiconque parmi ceux-ci se piquerait de tenir la porte à une dame se verrait emmené manu militari, convaincu de harcèlement sexuel et collé aux fers. Ces dames qui rêvent d'un monde d'eunuques semblent considérer par ailleurs que la soumission de certaines femmes aux rigueurs de telle religion qui foule au pied les droits des femmes, les contraint à être assujéties aux volontés de leur homme et à se recouvrir d'une housse, est l'expression et de leur féminité et des droits de la femme. No more comment.

Chosifié, le sexe, oui et ça date quand même de la libération des moeurs héritée non pas de 68 qui n'avait rien à voir avec ça (les féministes de l'époque, issue de la grande bourgeoisie parisienne, se cantonnaient aux idéologies de salon, lesquelles reconnaissons-le ont donné lieu au droit à la pilule et à l'avortement) mais du mouvement hippie et avant ça, de la lame de fond de la beat generation. Le corps apparaissait là où il s'occultait naguère, dans une dimension érotique qui chez la femme exaltait la féminité, alimentait chez l'homme le désir et non la fantasmatique, comme c'est le cas dans un régime d'interdits - celui que nous connaissons depuis que nous avons régressé sous le joug d'une bien-pensance organisée, le "tu as le droit de mater mais pas touche", décrit plus haut. Alors on compose avec ce conditionnement propre à entretenir la misère sexuelle de part et d'autre. Et ça donne une compétition au (à la) mieux-disant(e). Exemples Je contacte, les sites de rencontres en général, les thés dansants, les baloches de campagne initiés pour pallier à la solitude des paysans, tout ce qui est supposé rapprocher les unes et les autres selon des normes bien codifiées. Et éventuellement fabriquer de l'amour à défaut d'être encore capable de le rencontrer.

La non-binarité : qu'est-ce qu'un homme, un vrai, qu'est-ce qu'une femme, une vraie, à quoi ça doit correspondre ? Né chez Plumeau, on a prétendu m'expliquer qu'en tant que détenteur d'un zizi je devais penser comme ceci et me comporter comme cela, car c'est ce qu'une femme attend d'un homme, un vrai. Or, gamin je fuyais les bastons et séchais les stades, leur préférant les bouquins et d'interminables conversation avec la bibliothécaire de mon quartier. Ado je me fichais de ne pas posséder de mobylette et me désintéressais des courses de bagnoles et du foot, les motos me faisaient horreur et à tout cela je préférais les bouquins, encore, et la cinémathèque. Au rock je préférais les classiques, aux films de gangsters et à la SF je préférais les films d'auteurs, je préférais les copines aux copains, apprendre à coudre et à cuisiner me paraissait plus intéressant qu'apprendre à changer un carbu. Discuter du sens de la vie, des qualités d'un film, d'un livre, parler philo et mode avec des copines m'apportait plus que parler de politique et de cul avec les rares potes que j'avais, et moins encore de sport, sujet dont je me fichais comme d'une guigne. Je faisais le désespoir de mes vieux et j'étais catalogué ce que vous imaginez. Sauf que voilà, l'univers sudoripare de mes semblables porteurs de zizi m'indifférait. Leur culte de la compétition m'apparaissait puéril. Les valeurs viriles défendues à l'armée me semblaient relever du Néandertal. L'autorité quelle qu'elle soit, je la voyais comme surfaite, artificielle, tenant du jeu dans la cour de récré.
Alors je me suis posé très tôt cette question du genre qui est apparue à la surface il y a seulement une dizaine d'années. Ses tenants, ses aboutissants. Je n'ai pas grandi dans un milieu exclusivement féminin, j'ai eu un père, une mère, des oncles, des tantes, des cousins, des cousines, tous appartenant à la classe ouvrière. Et je ressentais en moi la synthèse des deux pôles et non leur antagonisme. Dire que ça ne m'a pas posé de problèmes dans mes rapports avec les gens en général, les femmes en particulier, serait mentir. Mais j'étais comme ça, je suis comme ça, je n'ai pas besoin de l'étaler extérieurement, j'ai appris à vivre avec. Voilà ce qui en est de mon expérience de ce qu'on dénomme aujourd'hui la non-binarité.